Connexion

L'affaire des vivants

L'affaire des vivants

L'affaire des vivants
de Christian CHAVASSIEUX
ed. PHEBUS

Charlemagne ressent une excitation qui est une sympathie pour l'idée même de ce manège infatigable; il décrète aussi que sa carrière l'emportera ici, pas tout de suite mais dans quelques années, au milieu de sa vie peut-être, pour un départ de plus, une frénésie. Ici, dans ce tourbillon qui agite encore les quais de gare, au milieu des rouages et des grondements, parmi la foule, sous le glacis de la grande marquise à Perrache, il se trouve chez lui, plus à l'aise qu'à Saint-Elme et à Mérives. Ici est son destin, il le comprend avec une intelligence renouvelée, après l'amollissement du trajet.

 

Le Second Empire est mort, Vive Charlemagne!

Né en 1850, ainsi bizarrement (et prémonitoirement) prénommé par son grand-père, Charlemagne Persant grandit misérablement dans une famille paysanne des environs de Lyon. Bridé par cette pauvreté qui lui interdit toute éducation digne de ce nom, il fait cependant montre très tôt d'une intelligence et d'un sens des affaires hors du commun. La défaite de Sedan et la proclamation de la IIIe République vont enfin lui permettre de s'élever socialement et de bâtir son propre empire commercial...

Il fait bon se plonger dans cette Affaire des vivants. Christian Chavassieux y déploie une langue ample et gourmande, attentive aux expressions, aux paysages et ressuscitant par petites touches impressionnistes le vécu de l’époque. On y découvre ainsi l’effervescence d’un monde en plein essor industriel, les prémices des luttes sociales, le déclin du monde campagnard qui s'annonce déjà. Tout ceci au fil d'un récit humain, attentif au moindre personnage, à la plus petite silhouette et qui glisse, sans avoir l'air d'y toucher, des questionnements de société qui résonnent avec autant de force près d'un siècle plus tard.

Et puis, pivot du roman avec toutes ces contradictions et ces fulgurances, provoquant à la fois admiration et répulsion, ce Charlemagne ambigu et féroce interroge magnifiquement notre rapport à la figure du tyran. 

 

Derrière ses allures de roman populaire, L'affaire des vivants s'appuie sur  la puissance et le plaisir romanesques pour mieux sonder notre société et les rapports aux pouvoirs.