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La servante et le catcheur

La servante et le catcheur

La servante et le catcheur
de Horacio CASTELLANOS MOYA
ed. MÉTAILIÉ

Sous ce titre improbable se cache un roman coup de poing, témoignage dévastateur des exactions commises lors de la guerre civile au Salvador, à partir de la fin des années 70.

Le Viking, ancienne gloire nationale du catch, s’est très tôt reconverti au sein de la police d’Etat et des escadrons de la mort. Il y a exploité ses « talents » physiques pour participer à de multiples arrestations d’opposants mais traîne maintenant comme un boulet ses souvenirs de célébrité et un cancer qui le ronge de l’intérieur depuis plusieurs mois. Le voilà embarqué dans une expédition de plus pour capturer un jeune couple d’ennemis au régime en place. Une opération a priori anodine mais qui va le remettre en contact avec Maria Elena, une servante qu’il a croisée et courtisée plusieurs années auparavant…
 
Dès les premières lignes, Horacio Castellanos Moya plonge le lecteur au cœur de la violence et installe une tension impressionnante. Les tortionnaires y sont des fonctionnaires comme les autres, faisant le sale boulot sans arrière-pensée ni remords. La narration change successivement de point de vue, s’attachant d’abord au Viking et à Maria Elena mais impliquant ensuite des proches de cette dernière. Manière habile de montrer aussi comment les choix politiques qui se firent lors de ces années sanglantes vont faire exploser des cellules familiales qu’on aurait pu croire unies.
 
Et si l’auteur fait parfois surgir la violence au coin d’une rue ou dans des résidences pavillonaires anodines, il faut aussi souligner avec quelle retenue il évite les scènes gores ou racoleuses. La violence est palpable, elle innerve le récit et donne toute son intensité au livre mais Horacio Castellanos Moya se garde bien d’aller dans la surenchère.
 
Il offre au final une peinture saissante de ces années d’horreur, traversée par la silhouette inquiétante du Viking. Une silhouette que l’on n’est pas près d’oublier.